vendredi 25 octobre 2013

Nous sommes des légendes


Du coeur de sa Bretagne propice aux rêveries et aux mystères, l'écrivain et chasseur d'étrangetés Claude Arz nous parle de "Légendes", un roman en deux tomes publiés chez Terre de Brume. Gérard Lefondeur y dresse une fresque fantastique et initiatique, empreinte de mythologies, où le dernier gardien d'un antique secret est confronté aux créatures les plus malfaisantes qui hantent les légendes.

Yann Kardec, designer à New York pour l’industrie du luxe, revient en Bretagne à la mort de son père. Au manoir familial, il découvre auprès de son grand-père qu’il est l'héritier d'un étrange pacte qui remonte à l'époque des Templiers et qui relie sa famille à de mystérieux Anciens aux pouvoirs surnaturels. Il sait qu’il doit continuer la mission de son père et ne pas avoir peur d’affronter les forces obscures. Dès lors, il va se trouver plongé dans une sombre et inquiétante aventure. Le fils prodigue renoue en effet avec la tradition familiale en devenant chasseur de légendes ou plutôt chasseur des créatures qui peuplent les légendes, des créatures cruelles et malfaisantes qui n ‘ont qu’un but : tuer les hommes.

Les temps du roman de Gérard Lefondeur se croisent, une fois nous sommes au XXIe siècle, une autre fois au Moyen Âge, en compagnie des Templiers ou du Vieux de la Montagne en Syrie.  L’histoire emprunte ainsi les labyrinthes du temps et fait surgir son lointain ancêtre Guillaume Kardec, Templier et membre d’un groupe interne aux Moines Soldats, l’Ordre des Sentinelles, un ordre secret chargé de  veiller sur l’Arche d’Alliance et la Clé des Mondes que les Templiers avaient récupérés lors de la première croisade.
Les légendes noires les plus emblématiques de France et d’ailleurs sont convoquées au grand banquet de Yann Kardec, le dernier chevalier combattant les forces obscures qui menacent l’humanité. À bride abattue, on croise Astaroth, le cavalier rouge, et les Anaons, les morts tourmentés aux frontières du visible et de l’invisible.  On traverse le Gévaudan, on parcourt le cimetière du Père-Lachaise, on visite le château de Tiffauges où  a régné le terrible Gilles de Rais. Des flots de sang coulent et des ombres sinistres guettent les humains.
Il y a de la magie dans le roman "Légendes".  Les personnages sont immergés dans une ambiance  ténébreuse, les tempêtes se succèdent au noir absolu des nuits sans étoiles sur les Monts d’Arrée. Au détour de vieux chemins forestiers, on rencontre des lavandières de la nuit, squelettiques, les terrifiantes kanerezed noz aux visages décharnés, on découvre aussi des ombres, un peuple d’ombres mouvantes, hostiles qui sortent des forêts et attaquent les hommes.
Au fil des pages, on sent palpiter les anciens dieux celtiques, comme la déesse Dana incarnée par la dangereuse et immortelle Diane et ses enfants les Daones Sidhes, fées et korrigans du Moyen Âge qui peuplent les grottes et les clairières.
On rencontre  surtout la mort qui plane sur le roman, menaçante,  implacable, comme le vol lourd d’un corbeau carnassier, comme le rappel d’un destin sans appel pour l’homme.
Si le roman "Légendes" s’inspire des anciennes légendes orales du peuple breton, il puise également dans l’histoire médiévale tourmentée du continent eurasien.

En écrivant "Légendes", Gérard Lefondeur a écrit un roman dense, exigeant, qui se place aux frontières du gothique romantique et de la Fantasy contemporaine. Il a su aussi créer une atmosphère digne d’Anne Radcliffe. Une réussite, une bonne nouvelle pour les lecteurs amateurs d’épopées fantastiques.

Claude Arz
Coat Questenn

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