Après une longue attente, me voici de retour, comme chaque année, au Festival du Film Asiatique de Deauville. C’est la 11e édition du genre consacrée cette année à la Corée du Sud. L’année 2008 ne fut pas riche en films fantastiques, genre dans lequel, il faut bien le reconnaître, les réalisateurs du lointain Orient sont passés maîtres. A mon grand dam, ce nouveau cru est aussi pauvre en surnaturel ! Que se passe-t-il ? Le genre deviendrait-il « persona non grata » à Deauville ? Le seul film hors compétition qui, me semble-t-il, flirte avec le fantastique est « Yamagata scream » du japonais Naoto Takenaka. Je dis bien « semble-t-il » car je n’ai malheureusement pas l’opportunité d’assister à la projection étant retenu sur un autre film. En deux phrases, voici le synopsis :
« Un homme d'affaires et des lycéennes en voyage de classe réveillent accidentellement les guerriers samouraïs de yamagata. Ces derniers, transformés en zombies, retournent dans le village d'oshakabe pour se venger des descendants des habitants et mettre ainsi fin à leur malédiction ». Le synopsis peut prêter à sourire, mais les japonais réalisent parfois des merveilles sur des scénarios aussi improbables.
Dans la sélection « Action Asia », nous retrouvons le réalisateur thaïlandais Thanakorn Pongsuwan, présent l’année dernière avec son film « Opapatika », seule œuvre empreinte de fantastique. Cette année, il revient avec « Fireball ». L’histoire met en scène un ex-taulard qui cherche à venger son frère, plongé dans un coma profond suite à sa participation à un tournoi de fireball, un jeu violent dérivé du basketball et organisé clandestinement par des bandes criminelles. Scénario classique dans le genre qui ne surprend guère. Je fais à Pongsuwan les mêmes reproches que son précédent film : œuvre superficielle où les scènes d’actions trop nombreuses mettent en avant une violence omniprésente et gratuite. Ce film n’a aucun intérêt et ne remporte d’ailleurs aucun prix.
Dans la même catégorie et donc en compétition, nous retrouvons « The divine weapon » du Sud Coréen Yoo-jin Kim. Il s’agit là d’un film en costumes d’époque que, malgré une facture classique, j’ai apprécié et qui se laisse agréablement regarder. Scène de combats, humour, aventure et histoire d’amour en filigrane… En clair, tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce film un succès commercial. Le pitch tient en peu de mots : «Pendant le règne du roi sejong, la dynastie coréenne joseon était l'incarnation parfaite de l'état. pour la dynastie chinoise ming, prétendant au pouvoir impérial, joseon représentait un obstacle à son expansion territoriale. afin de défendre son royaume, le roi sejong développa secrètement une arme d'une puissance inégalée… ». Lui non plus ne remporte pas de prix.
Si cette édition est pauvre en films fantastiques, elle nous réserve cependant quelques belles surprises tout en finesse et en émotion.
Tout d’abord, « Naked of defenses » du réalisateur japonais Masahide Ichii. Œuvre à l’atmosphère surréaliste qui aborde un sujet grave mais dont le réalisateur a su alléger l’ambiance avec quelques touches d’humour. En effet, tout au long du film, des moments drôles ponctuent un propos tout à fait sérieux. Suite à un événement dramatique, une femme se coupe de toute émotion et traverse sa vie machinalement, avec aigreur et sans espoir d’un avenir meilleur. Mais une jeune femme à la personnalité spontanée va faire irruption dans sa vie. Par sa condition de femme enceinte, elle va réveiller les douleurs du passé, mais aussi l’étincelle de vie chez celle qui n’attend plus rien. Ce film qui a déjà remporté plusieurs prix dans d’autres festivals, notamment le grand prix du « Pia Film Festival » en 2008, ne séduit malheureusement pas le jury de Deauville.
Vient ensuite « Island Etude » de En Chen. Un jeune homme malentendant décide de longer les côtes taïwanaises à vélo, sa guitare en bandoulière, afin de faire le tour de l'île en sept jours. Bouffée d’air pur parmi une sélection de films à l’atmosphère pesante, cette carte postale ne régale pas non plus le jury. Dommage.
Nous poursuivons avec « My dear enemy » (hors compétition) du Sud Coréen Yoon-ki Lee, une comédie fort sympathique. L’histoire : Sans travail, trentenaire et célibataire, Hee-so est une jeune femme malheureuse. Un jour, elle part à la recherche de son ancien petit ami, Byoung-woon. Ce n'est pas l'amour qui va les réunir à nouveau mais une somme d'argent que Byoung-woon lui a empruntée un an plus tôt. Egalement sans ressources, ce dernier est toujours ravi de rencontrer des filles prêtes à lui donner de l'argent.
Malgré le portrait peu reluisant du héros, on se prend de sympathie pour lui et découvre petit à petit, sous son air insouciant et apparemment immature, son humanité. J’ai beaucoup aimé.
J’ai toujours apprécié les films asiatiques et souvent épiques en costumes d’époque, mêlant scènes de combat et décors fabuleux. De fait, je recommande « A frozen flower » (hors compétition) réalisé par Ssang Hwa Geom et inspiré de faits réels.
Treizième siècle. Devant la montée de l'influence politique de la dynastie yuan sur la dynastie goryeo, le roi de goryeo décide de créer une garde rapprochée d'élite. Il tombe sous le charme de Hong lim, le commandant en chef de cette unité. Un jour, le roi lui ordonne de coucher en secret avec la reine plutôt qu'avec lui, afin de lui donner un fils qui sera son successeur et renforcera ainsi l'indépendance de goryeo.
Ce film d’aventure, avec en fond une histoire d’amour impossible, est un plaisir pour les yeux, malgré parfois quelques petites longueurs.
Je termine avec certainement le plus beau film du festival, évidemment hors compétition. Il s’agit de « Departures » du Japonais Yojiro Takita qui a remporté de nombreuses récompenses à travers le monde. En effet, outre les récompenses remportées dans son propre pays, cette œuvre sublime a reçu le grand prix des Amériques au Festival des films du monde de Montréal, le prix du public au festival du film de Hawaii ainsi que trois récompenses aux « Oscars » chinois. Enfin, ultime consécration à Hollywood, il a obtenu dernièrement l’Oscar du meilleur film étranger.
Daigo, un violoncelliste, retourne dans son village natal afin de chercher un nouvel emploi après la dissolution de son orchestre. Il est engagé dans une entreprise de pompes funèbres mais, de honte, n'arrive pas à l'avouer à sa femme. Ce travail que personne ne veut faire et que Daigo lui-même n'aurait jamais pensé faire va transformer aussi bien les morts que leurs proches encore en vie.
Ce film qui nous plonge dans les rites funéraires japonais est une réussite en tout point. Le réalisateur aborde cet univers avec une grande sensibilité sans jamais tomber dans la facilité. Et si le sujet peut sembler de prime abord assez noir, il est ponctué de nombreux moments très drôles et magnifiquement porté par la musique de Joe Hisaishi (Princesse Mononoké, Le voyage de Chihiro, Le château ambulant…). Ce dernier était d’ailleurs présent l’an passé à Deauville. En clair, dès sa sortie, courez voir ce film touchant et lumineux qui aborde un sujet universel, mais néanmoins tabou dans notre société occidentale : la mort.
Erick Fearson
« Un homme d'affaires et des lycéennes en voyage de classe réveillent accidentellement les guerriers samouraïs de yamagata. Ces derniers, transformés en zombies, retournent dans le village d'oshakabe pour se venger des descendants des habitants et mettre ainsi fin à leur malédiction ». Le synopsis peut prêter à sourire, mais les japonais réalisent parfois des merveilles sur des scénarios aussi improbables.
Dans la sélection « Action Asia », nous retrouvons le réalisateur thaïlandais Thanakorn Pongsuwan, présent l’année dernière avec son film « Opapatika », seule œuvre empreinte de fantastique. Cette année, il revient avec « Fireball ». L’histoire met en scène un ex-taulard qui cherche à venger son frère, plongé dans un coma profond suite à sa participation à un tournoi de fireball, un jeu violent dérivé du basketball et organisé clandestinement par des bandes criminelles. Scénario classique dans le genre qui ne surprend guère. Je fais à Pongsuwan les mêmes reproches que son précédent film : œuvre superficielle où les scènes d’actions trop nombreuses mettent en avant une violence omniprésente et gratuite. Ce film n’a aucun intérêt et ne remporte d’ailleurs aucun prix.
Dans la même catégorie et donc en compétition, nous retrouvons « The divine weapon » du Sud Coréen Yoo-jin Kim. Il s’agit là d’un film en costumes d’époque que, malgré une facture classique, j’ai apprécié et qui se laisse agréablement regarder. Scène de combats, humour, aventure et histoire d’amour en filigrane… En clair, tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce film un succès commercial. Le pitch tient en peu de mots : «Pendant le règne du roi sejong, la dynastie coréenne joseon était l'incarnation parfaite de l'état. pour la dynastie chinoise ming, prétendant au pouvoir impérial, joseon représentait un obstacle à son expansion territoriale. afin de défendre son royaume, le roi sejong développa secrètement une arme d'une puissance inégalée… ». Lui non plus ne remporte pas de prix.
Si cette édition est pauvre en films fantastiques, elle nous réserve cependant quelques belles surprises tout en finesse et en émotion.
Tout d’abord, « Naked of defenses » du réalisateur japonais Masahide Ichii. Œuvre à l’atmosphère surréaliste qui aborde un sujet grave mais dont le réalisateur a su alléger l’ambiance avec quelques touches d’humour. En effet, tout au long du film, des moments drôles ponctuent un propos tout à fait sérieux. Suite à un événement dramatique, une femme se coupe de toute émotion et traverse sa vie machinalement, avec aigreur et sans espoir d’un avenir meilleur. Mais une jeune femme à la personnalité spontanée va faire irruption dans sa vie. Par sa condition de femme enceinte, elle va réveiller les douleurs du passé, mais aussi l’étincelle de vie chez celle qui n’attend plus rien. Ce film qui a déjà remporté plusieurs prix dans d’autres festivals, notamment le grand prix du « Pia Film Festival » en 2008, ne séduit malheureusement pas le jury de Deauville.
Vient ensuite « Island Etude » de En Chen. Un jeune homme malentendant décide de longer les côtes taïwanaises à vélo, sa guitare en bandoulière, afin de faire le tour de l'île en sept jours. Bouffée d’air pur parmi une sélection de films à l’atmosphère pesante, cette carte postale ne régale pas non plus le jury. Dommage.
Nous poursuivons avec « My dear enemy » (hors compétition) du Sud Coréen Yoon-ki Lee, une comédie fort sympathique. L’histoire : Sans travail, trentenaire et célibataire, Hee-so est une jeune femme malheureuse. Un jour, elle part à la recherche de son ancien petit ami, Byoung-woon. Ce n'est pas l'amour qui va les réunir à nouveau mais une somme d'argent que Byoung-woon lui a empruntée un an plus tôt. Egalement sans ressources, ce dernier est toujours ravi de rencontrer des filles prêtes à lui donner de l'argent.
Malgré le portrait peu reluisant du héros, on se prend de sympathie pour lui et découvre petit à petit, sous son air insouciant et apparemment immature, son humanité. J’ai beaucoup aimé.
J’ai toujours apprécié les films asiatiques et souvent épiques en costumes d’époque, mêlant scènes de combat et décors fabuleux. De fait, je recommande « A frozen flower » (hors compétition) réalisé par Ssang Hwa Geom et inspiré de faits réels.
Treizième siècle. Devant la montée de l'influence politique de la dynastie yuan sur la dynastie goryeo, le roi de goryeo décide de créer une garde rapprochée d'élite. Il tombe sous le charme de Hong lim, le commandant en chef de cette unité. Un jour, le roi lui ordonne de coucher en secret avec la reine plutôt qu'avec lui, afin de lui donner un fils qui sera son successeur et renforcera ainsi l'indépendance de goryeo.
Ce film d’aventure, avec en fond une histoire d’amour impossible, est un plaisir pour les yeux, malgré parfois quelques petites longueurs.
Je termine avec certainement le plus beau film du festival, évidemment hors compétition. Il s’agit de « Departures » du Japonais Yojiro Takita qui a remporté de nombreuses récompenses à travers le monde. En effet, outre les récompenses remportées dans son propre pays, cette œuvre sublime a reçu le grand prix des Amériques au Festival des films du monde de Montréal, le prix du public au festival du film de Hawaii ainsi que trois récompenses aux « Oscars » chinois. Enfin, ultime consécration à Hollywood, il a obtenu dernièrement l’Oscar du meilleur film étranger.
Daigo, un violoncelliste, retourne dans son village natal afin de chercher un nouvel emploi après la dissolution de son orchestre. Il est engagé dans une entreprise de pompes funèbres mais, de honte, n'arrive pas à l'avouer à sa femme. Ce travail que personne ne veut faire et que Daigo lui-même n'aurait jamais pensé faire va transformer aussi bien les morts que leurs proches encore en vie.
Ce film qui nous plonge dans les rites funéraires japonais est une réussite en tout point. Le réalisateur aborde cet univers avec une grande sensibilité sans jamais tomber dans la facilité. Et si le sujet peut sembler de prime abord assez noir, il est ponctué de nombreux moments très drôles et magnifiquement porté par la musique de Joe Hisaishi (Princesse Mononoké, Le voyage de Chihiro, Le château ambulant…). Ce dernier était d’ailleurs présent l’an passé à Deauville. En clair, dès sa sortie, courez voir ce film touchant et lumineux qui aborde un sujet universel, mais néanmoins tabou dans notre société occidentale : la mort.
Erick Fearson
Crédit photo : Yuko T.
2 commentaires:
J'apprécie beaucoup le cinéma asiatique et si il vrai que le fantastique n'est, une fois de plus, pas d'actualité cette année, il serait dommage de bouder le reste sachant que l'on peut louper des perles rares.
Evidemment on espère voir à nouveau quelques chef d'oeuvres du genre qui nous passionne tant qui fût porté par les excellents Hideo Nakata, Takashi Shimizu, Shinya Tsukamoto ou encore Takashi Miike (oui il ne s'agit là que de réalisateurs nippons, je n'ai presuqe vu aucun film fantastique sud-coréen à part Deux Soeurs, chinois, thailandais ou autres).
Je me rappelle du Festival d'Avoriaz, qui n'existe plus, aujourd'hui, remplacé par celui de Gérardmer. Je ne connaissais l'autre festival de Deauville, pas celui-là.
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