jeudi 19 mai 2011

Le Manoir de l'Enfer serait-il à Paris ?

Une "maison de l’enfer" rue de Paradis, il fallait oser ! Nous sommes vendredi 13 mai, le jour idéal pour visiter le premier musée hanté de Paris qui vient d'ouvrir ses portes dans le 10e arrondissement. Adaptation d'un concept d'attraction anglo-saxon, le Manoir de Paris propose un parcours interactif pour revisiter les célèbres histoires surnaturelles et policières du Paris mystérieux : le fantôme de l'Opéra, le disparu des catacombes, le fantôme des Tuileries, le pâtissier sanguinaire de la rue des Marmousets,... Tout au long de la visite, dans un dédale de décors gothiques plongés dans la pénombre sur deux niveaux de 500m2 chacun, l'intrépide visiteur est interpellé, parfois aux limites de la crise cardiaque, par une vingtaine de comédiens qui font revivre les personnages de ces légendes urbaines.

Au premier abord, le lieu a du style. Adil Houti, le créateur du Manoir de Paris, a choisi d'implanter sa maison hantée dans l'ancien siège des faïenceries Boulenger de Choisy-le-Roy, classé aux monuments historiques. Devant l'imposante façade couverte de céramiques, un majordome à la gestuelle désarticulée vous dévisage de son regard vitreux avant de vous hurler dans les oreilles, au moment où vous vous y attendez le moins. Pas de quoi décourager un ex-otage des spectres de Mortemer, entre autres ! Dans le grand hall sous verrière, une femme s'approche de vous. Ses yeux noirs vous hypnotisent avant de pousser son cri perçant. A vous glacer le sang... Ainsi mis en condition, l'aventure peut commencer. Un membre du staff technique vous prodige les derniers conseils (pas de flash, aucun contact physique avec les comédiens) avant de vous faire pénétrer dans un sombre couloir. Un vrai coupe-gorge. "Chair fraîche !" s'amuse-t-il à beugler. Sans doute le signal pour avertir la dangereuse troupe qui vous attend de pied ferme. Je suis seul.
Mes yeux ne se sont pas encore accoutumés à l'obscurité. Première rencontre, premier sursaut. Elle préfigure une déambulation qui ne sera jamais de tout repos. Je finis par raser les murs, craignant chaque recoin. La paranoïa est latente. C'est d'ailleurs ce qui caractérise l'ADN du spectacle : l'effet de surprise, en boucle et sans échappatoire. Il vous suffit alors d'en rire ou en mourir. En effet, le Manoir de Paris emprunte aux codes du train fantôme des fêtes foraines ou du Phantom Manor de Disneyland, le but de l'expérience étant d'accroître votre trouillomètre à chaque pas. Cependant, contrairement aux attractions linéaires, vous êtes libre de vos mouvements. Même si aucune retraite ou déviation ne sont possibles. Je progresse donc, de salle en salle, à la découverte des ambiances, d'une technique bien rodée, en quête des légendes parisiennes. Trente minutes plus tard, ma tachycardie fait une pause : je suis dans la boutique de souvenirs. Elle porte bien son nom. Le spectacle est-il déjà fini ? J'en ai bien peur. Certains visiteurs respirent enfin. Moi, je ronge un peu ma frustration. Mais où étaient donc les fantômes, ceux de mon imagination ? Car, au Manoir de Paris, tout est incarné. Les légendes servent un peu de prétexte. Ou alors faudrait-il prendre le temps de les lire, sur les grands panneaux de l'entrée, pour profiter davantage de l'interactivité avec les comédiens, tous irréprochables.
Les promesses de sensations fortes et de dépaysement sont garanties. J'avoue avoir eu du mal à réintégrer la vie extérieure, la rue, le XXIe siècle. Mais, je regrette n'avoir été qu'effleuré par l'expérience, sans infusion, ni séquelles. Certes son emplacement au cœur de la ville facilite l'accès au plus grand nombre. Mais ce qui fait le charme d'un lieu hanté, c'est son isolement, sa rupture avec l'agitation urbaine. Entrer dans une maison interdite, pour affronter l'inconnu, impose une initiation, un temps d'approche. Au Manoir de Paris, tout est intense mais trop précipité. Il faudrait prendre plus le temps d'être bousculé. J'avais envie de croire au livre dont vous êtes le héros de mon enfance, le Manoir de l'Enfer, de Steve Jackson. Explorer à mon rythme, faire de mauvaises comme de bonnes rencontres, choisir entre deux portes, m'attarder, éprouver mes sens, bouquiner au coin du feu. Faut-il y proposer des formules de visites guidées ou de conférences, comme les ghost tours ? "Cela ralentirait le rythme et ferait sortir les visiteurs de la dynamique d'ensemble. Le Manoir de Paris, c'est un peu le 'grand huit' de la peur" m'explique Adil Houti. Et il sait de quoi il parle.
D'origine belge, domicilié à San Diego et résidant en France depuis deux ans pour créer le Manoir, ce diplomé en droit et en relations internationales est un féru de fantastique et d'entertainment.  Il a participé à l'élaboration de deux fausses maisons hantées au Texas (House of Torment et 13th Floor). L'adaptation du concept à la sensibilité du public français est une vraie gageure tant les "héritiers des Lumières" que nous sommes sont imprévisibles face aux mystères insondables du monde, qu'ils soient authentiques ou factices. En France, une émission de télévision, un livre ou tout autre projet consacré au paranormal peut faire un carton ou un flop. Jamais pour les mêmes raisons. Il n'y a aucune règle qui compte. Les cartésiens ne sont pas connus pour leur sens de l'émotion. Je salue donc l'audace du pari. Seule ombre au tableau : le prix, plus cher qu'une place de cinéma. Même si j'étais invité pour représenter les lecteurs de Maison-Hantee.com, je dois reconnaître que le tarif d'entrée pourrait en dissuader plus d'un.
Une question me hante encore : et si le lieu, visiblement chargé d'histoire, était vraiment hanté ? Alors, que se passe-t-il quand le Manoir de Paris est fermé au public, que la scénographie est coupée et que les acteurs sont partis ? Si on provoque les créatures de notre imaginaire, finissent-elles par apparaître pour de bon ?

Olivier Valentin

Pour en savoir plus : http://lemanoirdeparis.fr/accueil

6 commentaires:

Merlin a dit…

Initiative insolite même si le résultat peut être décevant. Le côté "attraction" me froisse un peu. Dans le genre, je préfère l'abbaye de Mortemer et son musée des fantômes, plus "naturel". Quoi qu'il en soit, il me faut découvrir cet endroit !

Allez-vous bientôt repartir sur les routes de la France mystérieuse ? Ce serait un plaisir de lire de nouvelles aventures !

Michelle Lhôrence a dit…

Merci de nous avoir inviter à partager cette promenade mystérieuse, il était temps qu'une capitale comme Paris se dote d'un tel concept. Mais après tout, si les places sont plus chères que celles d'un cinéma, si l'on ne regrette rien comme dit la chanson, c'est extra.Paris se met à l'heure des nouveautés, mais avec une telle plume, Olivier Valentin nous plonge déjà dans cette atmosphère et désir de s'y rendre. Merci encore

Michelle Lhôrence

agence escort geneve a dit…

Dommage que je n'ai pas pu venir !Qui sait, un jour je serai présent à un évènement chez la Maison-Hantée de Paris et j'espère que ta question à la dernière paragraphe se réalisera !

Jip a dit…

Les réceptions du Comte de Brume sont légendaires pour leur ambiance diabolique ... Franklin prévoit-il d'être de la partie ? Je ne manquerais pour rien au monde le spectacle de sa transformation ... !

radioeiffel a dit…

Je viens d'en entendre parler su Europe 1. on peut y aller avec des enfants ? A partir de quel age ?

Le Blog de Maison-Hantee.com a dit…

Merci de vous rapprocher directement du lieu sur http://lemanoirdeparis.fr